AGRICULTURE
On abandonna d'abord les raisins de cuve pour
planter des raisins de table qui ne donnèrent rien et qui furent arrachés dix ans plus
tard pour laisser la terre à la merci de l'érosion... la grande cave coopérative fut
réduite en ruine et je suis peut-être l'une des rares personnes à en conserver un
souvenir scriptural puisque j'eus la présence d'esprit de la photographier avant sa
destruction (voir photo). A la place de la
cave on érige aujourd'hui des logements dits "sociaux" ... La destruction des
raisins de cuve ne fit aucun effet à l'amour voué par certains villageois à Bacchus
mais au lieu de matérialiser cet amour par des jus de chez nous, ils se sont trouvés
contraints d'ingurgiter d'insipides breuvages de l'étranger, extraits de raisin qui n'a
pas eu la chance de mûrir au bon soleil d'Algérie.
On arrêta la culture du tabac et, pour faire
diversion, on essaya la betterave fourragère puis le tournesol... contrairement aux
désirs secrets des initiateurs de l'experience, les résultats furent au dessus de toutes
les prévisions pour ne pas dire les espérances puisqu'il était évident qu'on faisait
tout pour ne rien esperer... On abandonna l'idée parce qu'elle allait peut-être
générer une situation d'auto-suffisance qui allait donner de l'huile au peuple mais pas
de blé aux grosses huiles...
La culture du tabac est aujourd'hui totalement
ignorée par les paysans car ceux qui en detenaient l'experience ont tous disparu. L'Etat
encourage depuis quelque temps le retour vers cette speculation, hélas, personne ne veut
y souscrire.
La dernière trouvaille fut celle de déplacer la
seule huilerie du village vers Lakhdaria pour d'obscures
velleités de cession de ses infrastructures à quelque quidam. Le forfait a été
accompli en partie puisque l'huilerie a été démontée pour être installée ailleurs
sans toutefois que sa bâtisse ne soit cédée car des interêts divergents ont vu le
jour... Cette bâtisse a été érigée en... salle de sport martial ! ... et les
villageois doivent aujourd'hui transporter leurs olives jusqu'à Boumia dans la commune
limitrophe d'Aomar ou se résigner à faire plus de 25 km pour
les triturer dans leur huilerie que des mains criminelles ont déplacée pour parfaire le
démantèlement des trois pilliers sur lesquels reposait leur village.
L'agriculture est aujourd'hui sinistrée... les
céréales ne donnent même pas de quoi compenser les prix des travaux et des intrants;
les restructurations successives ont morcelé la terre au point où aucune exploitation
rationnelle n'est possible; les tracteurs et remorques sont utilisés dans des travaux
plus rentables et moins pénibles de transport de matériaux de construction et de
colportage d'eau par citernes. Les aides considérables que consent l'Etat sont
immédiatement phagocytées par les mêmes personnes faisant partie des mêmes cercles
d'initiés qui écument le pays depuis son indépendance et parfois même bien avant...
L'olivier se meurt, le figuier dépérit,
l'élevage n'est plus pratiqué que par quelques villageois qui se doivent de louer les
talus des routes pour y faire paître leurs bêtes... l'aviculture industrielle a fait
illusion... devenue très coûteuse, elle est abandonnée graduellement et chaque année
des poulaillers se vident irréversiblement. L'expansion qu'elle a connue dans les années
70 a eu une grave conséquence: elle a littéralement décimé le poulet
de ferme qui donnait des oeufs et de la viande à tous les foyers en recyclant leurs
déchets...
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