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AMIR:
Ce gros bonhomme exubérant est
indissociable du village. En toutes saisons et par tous les temps, il est là à laisser
jouer sa faconde. Dès qu'il y a un attrouppement vous êtes assurés de découvrir que
c'est lui qui crée la sensation. Il n'a jamais pris quoi que ce soit au sérieux - même
le service militaire ! Il a un jour décidé de ne plus rejoindre la caserne et il l'a
fait. Il est resté au village, chez lui, pendant plus d'une année et quand le brigadier
Ziani est venu l'arrêter il s'est laissé faire avec le sourire. Au TM il écopa de
quelques années de prison. Il les passa en rigolant et sortit en rigolant... Aujourd'hui
il s'est converti en "tracteuriste" et il n'arrête pas de sillonner la route du
village pour transporter des materiaux de construction, du fumier, des bottes de foin...
et à l'occasion il fait le porteur d'eau à l'aide de sa citerne. On le voit sur cette
photo aider filali à faire provision de "h'laffa" pour nourrir ses lapins. |
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EL
BLED: Rien ne le prédestinait à devenir
maire du village. C'est un homme d'une grande générosité mais aussi d'une ferme
tenacité. Il aimait à répéter que quand on s'engageait dans un défi il fallait
accepter d'en revenir avec "des pieds en bois ou un dentier en or". Il
accomplit son service militaire durant la crise d'Amgala... Il en revint blindé. Il prit
les rênes de la Commune en pleine periode de troubles et d'insécurité et fut reconduit
aux élections municipales qui suivirent. Il resta indépendant de tous les groupes de
pression et s'appuya sur le lumpen prolétariat au grand dam de la "noblesse"
de la "bourgeoisie" et du "clérgé" locaux, ce qui lui valut
des blocages inimaginables. L'un de ses mérites fut de détruire les auras surfaites dont
on adffublait les têtes de certaines personnes injustement considérées comme
providentielles. |
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FILALI: Ses lunettes de vue lui donnent un air intellectuel.
Il n'a rien retiré des postes superieurs qu'il a occupé depuis qu'il eut son bac en
1971... il fut d'ailleurs le premier bachelier de la commune... Avec Hamoudi Bouzid, Adjou
Messaoud, Bouzetine Omar et d'autres copains, il créa l'ARD qui, à défaut d'amasser les
trophées en football eut le mérite de remporter bien des titres en fair-play. La bonne
société ne lui pardonnera pas d'avoir réduit les distances entre nobles et roturiers,
entre pauvres et fortunés, entre érudits et ignorants. |
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FATAH 24: Fatah
est un homme à part. Toujours disposé à servir les autres, il est capable d'oublier de
se servir. Il abhorre la fierté mal placée et se refuse de faire révérence à ceux qui
croient détenir une parcelle quelconque de puissance ou d'autorité. Très tôt orphelin
de père, il sut se débrouiller pour survivre; il exercça sans rougir tous les métiers
malgré un niveau d'études somme toute appréciable. Il travailla comme manutentionnaire
à l'usine d'eau minérale de Ben Haroun et dans les champs du comité de gestion.
L'histoire devrait l'inscrire comme premier éleveur de volailles de la contrée. Il dut
abandonner ce metier où il excella, faute de terres où implanter son poulailler. Il est
aujourd'hui responsable de la gestion des stocks au niveau du complexe de détergents de
Lakhdaria où il accomplit son travail loin des feux de la rampe, ce qui n'est pas pour le
déranger. |
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HANNANI:
Foncièrement honnête, Hannani est un de
ces fonctionnaires qui accordent à leur travail une importance capitale. Il ne sait ni
mentir ni tricher et c'est peut être pour ça qu'il n'a pas gagné grand chose de sa
longue carrière dans l'administration communale contrairement à la plupart de ses
collègues. C'est une figure indissociable du village. Il exerce un fort ascendant sur les
"jeunes" et peut à lui seul bloquer un mouvement de contestation. Les bagarres
entre jeunes loubards ne lui resistent pas. |
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EL HADJ:
On l'appelle aussi "Laghlough". C'est lui le pourvoyeur en
chique de tout le village. Il accorde un soin si grand à la fabrication de cette matière
que personne ne peut prétendre le concurrencer pour bien des années à venir. C'est un
gentil monsieur qui, en dépit de son indigence, est d'une générosité grosse comme ça. |
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NAKRACHE: De son vrai nom: Essaid Guerrache . Un des campeurs du figuier dans
les années 80. Il défraya la chronique en s'investissant dans la politique pour briguer
le poste de maire avec une formation trotskyste alors qu'il n'a rien d'un rouge. Il sut
mobiliser les laissés-pour-compte et créer une véritable mini-révolution au village en
jouant l'outsider entre les partis huppés du bled. Son experience n'eut malheureusement
aucune suite car l'adversaire principal a tout fait pour ne pas avoir à s'accommoder
d'une opposition. Aujourd'hui blasé, Nakrache a rempilé mais il n'est pas sûr qu'aux
prochaines joutes il ne reprendra pas le chemin de la politique. |
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AMAR BELAID:
Inamovible derrière son comptoir, Amar Belaid est là,
depuis bien avant l'indépendance à servir les villageois. Son métier de commerçant, il
l'accomplit avec tact et minutie. Il se fait un devoir de ne pas spéculer et ne profite
jamais des pénuries sporadiques pour relever ses prix. Son épicerie est un modèle
d'ordre et de propreté. Si on devait octroyer la médaille de la persévérance, personne
n'aurait le mérite d'en bénéficier avant lui. |
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SALEM:
Il arracha de haute lutte sa place de goal dans les
rencontres de football qui se déroulaient sur la terre battue de la place publique mais
ça remonte à très loin... Aujourd'hui Belga est un père de famille rondouillard qui
essaie de trouver un toit à ses enfants et du pain pour les nourrir. Il exerce les
fonctions de magasinier à l'usine d'eau minérale de Ben Haroun après avoir longtemps
fait le pointeur au comité de gestion. Il accomplit avec amour son boulot au point où il
est capable de vous citer de mémoire les références de tous les roulements du magasin
et leur nombre. Salem traverse la vie sans trop faire de remous; très loin des vilains
jeux de la politique, il essaie de garder ses distances envers tous les intrigants... |
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MAHFOUD TCHALANI:
Fidèle supporter de l'équipe de football locale, il ne pouvait concevoir qu'elle jouât
sans sa présence sur la ligne de touche où il n'arrêtait pas de faire les cent pas dans
sa kachabya élimée. Il admettait difficilement la défaite mais, de caractère
extrêmement pacifique, il se révoltait à sa manière et tout le monde se souvient de
ses "ila zett djit'ha !" (si on me prenait à revenir !)... mais il revenait
toujours. Aujourd'hui devenu grand-père Mahfoud Tchalani a perdu de son acuité visuelle
et de sa verve d'antan. Il essaie de faire vivre sa progéniture en cherchant des boulots
occasionnels. Mais si vous vous amusez à parler de cette periode faste des années 70,
vous ses yeux luire d'une belle lueur de nostalgie... |